Fragment XXIX
Je t’entends partir
Je t’entends faillir
Je t’entends dormir
Ton ronflement
Berce
Accompagne
Ma solitude
Au moins ca !
Ton sifflement
Ton oisiveté
Atteignent
Les méandres
De ce qui
Me reste
Comme raison
Seul !
Je marche
Seul !
Je compose
Seul !
Je décompose
Seul !
Je pose
Seul !
Je dissolve
Seul !
Je nomme
Seul !
Je dénomme
Quelle absurdité
Est-ce ?
Quelle folie
Est-ce ?
Que je marche !
Que j’erre !
Que je devienne
Fou !
Tes heures
Tes saisons
Ton passé
Ton présent
Somnolent
Sur mes yeux
Éveillés
De ton temps
Je suis l’exclu
De ton monde
Je ne suis
De ton ailleurs
Je ne suis
Pas
Être
Ou
Ne pas
Être
C’est là la question
Tu es où
Je ne suis pas
Je suis
Où tu n’es pas
Qui suis-je ?
S’il te plait
Envahis mon silence
Fouette ma vacance
Par la cravache
De ta satanique
Symphonie
Parce que
Tu ronfles
Oui
Tu ronfles !
Les balbutiements
Que tu profères
Et qui se débitent
Malgré toi
Disent cette folie
Qui me gangrène
Fouette
Mon silence
Avoue tes secrets
Rêves
S’il te plait
Prends-moi
Avec toi !
Ne sois pas ingrate
Emmène-moi
Dans ton absence
De ce côté
De rien où
Règne
Ta vacuité
Emmène-moi
S’il te plait !
Mon oreille
Est déserte
Infectée
Que dis-je
Infestée
Juste par cette
Purulente litanie
Qui accompagne
En duo
Tes diaboliques
Ronflements
Avec en comble
De percussion
Ce lubrique
Silence
Du commun des
Mortels
Qui ne vivent que
Le matin
Et ce chien !
Ce chien
Sans pédigrée
Ce bâtard
De chien
Qui aboie
Annonçant
L’aube incertaine
L’aube des gâtés
Des ivrognes
Revenant de
Leur banquet
Ces esclaves
De l’ère moderne
Ces cancrelats
Qui démarrent leur
Voiture à crédit
Ce lépreux
Ce galeux
De chien
Qui accompagne
Leur vigile
Veillant sur
Leur grégaire
Sérénité
Et moi !
Moi je suis
Prisonnier
De tes ronflements
Et des aboiements
Du galeux
Héros des abattoirs
Désaffectés
S’il te plait
Emmène-moi
Avec toi
Fouettes de ton
Ronflement
Mes yeux enflés
Bridés
Débridés
A force de voir
Leur maudite aube
Je me révulse
De voir le soleil
Vomir ses lueurs
Annonçant une
Autre torture
Le clébard aboie
Tout son saoul
Repu
Il ose quelques mètres
Loin de
Son maitre
Arrive à la ruelle
D’à côté
Reviens bredouille
A côté de son maitre
Le veilleur de leur nuit
Ils s’éveillent
Dans leur aube
Leurs squelettes
S’érigent
Qui de la première prière
Qui à pied
Qui de sa voiture
Qui de sa charrette
Qui de ses marchandises
Menthe
Eau de javel
Vieux habits
De partout
De nulle part
Dans tous sens
Les éboueurs
Contents de leur
Nouvelle benne
S’y mettent de la partie
Des rabats-joie
Des inviteurs
A l’insomnie
J’entends leurs
Pas … pan pan pan
Pan pan pan
Armée de cancrelats
Horde de sauvages
Modernes
Fouteurs de troubles
Me donnent
Le coup de grâce
S’il te plait
Emmène-moi !
Assaisonne
Ma maudite journée
De ta nonchalance
Orne-la
De ton ron ron ron
Ronflement
Efface mon soleil
Peint ma lumière
Du noir
De tes
Pleines nuits
Emmène-moi
Dans ta vacuité
Contamine-moi
De ton indifférence
Rachid Daouani
Février 2009